Brigitte Magnien
Nous apprenons le décès de Jacqueline Tauzin, latino-américaniste de l'Université de Clermont-Ferrand. Toutes nos condoléances à sa famille et à ses proches, et tout particulièrement à sa nièce, notre collègue et membre du Comité de la SHF, Isabelle Tauzin-Castellanos.
Jacqueline Tauzin (1925-2018).
Le 15 avril 2018 est décédée Jacqueline Tauzin, maître de conférences honoraire à l'Université Blaise Pascal de Clermont-Ferrand. Fille aînée d’instituteurs, née en 1925, Jacqueline Tauzin grandit à Condom, dans le Gers, puis prépare le concours de l’École Normale Supérieure de Sèvres au Lycée Saint-Sernin de Toulouse. Reçue à vingt ans à Sèvres (la fusion entre Ulm et Sèvres aura lieu en 1985), Jacqueline Tauzin arrive en 1945, à Paris dans une capitale en pleine recomposition politique, sociale et culturelle ; en Sorbonne, elle suit les enseignements de Marcel Bataillon sur la Comedia et sur Erasme. Attirée par l’Amérique latine, elle ne peut partir pour une destination lointaine comme les jeunes gens de la même génération. Sa formation d’hispaniste la conduit à Madrid à la Casa de Velázquez puis à Lisbonne, du fait de la campagne internationale contre le régime franquiste et la fermeture des frontières. En 1949, reçue première à l’agrégation d’espagnol, elle entre dans l’enseignement secondaire, est nommée dans le Puy-de-Dôme, avec un engagement politique fort qui bloque longtemps tout projet de carrière dans le Supérieur. Nommée assistante à l’université de Clermont-Ferrand, elle devient ensuite maître-assistant et a en charge les enseignements sur l’Amérique latine, de la première année à l’agrégation jusqu’en 1985. Elle prend part aux travaux de recherches des groupes latino-américanistes et produit des articles sur Carpentier et Neruda tout en s’intéressant au Mexique, à l’Argentine et au Pérou, suivant les questions de concours qui nécessitent de répondre à la demande immédiate sans prendre le temps de développer une recherche sur la longue durée. Une fois partie à la retraite, elle reste fidèle à ses convictions militantes et consacre le temps libéré à son fils, François Génin, établi à Clermont-Ferrand et resté éloigné du monde académique. Le lien avec l’hispanisme est entretenu en filigrane par sa nièce latino-américaniste en poste à Bordeaux. Isabelle Tauzin-Castellanos.
L'incinération est prévue mardi 24 avril à Clermont-Ferrand.
Le Département d'Espagnol de l'Université Jean Monnet de Saint-Etienne, tous ses amis, collègues et anciens étudiants ont la tristesse d'annoncer le décès de Asensio Gutiérrez, Professeur émérite, survenu le 6 mars 2018, à Lyon, à l'âge de 83 ans.
Auteur d'une thèse d'État sur La France et les Français dans la littérature espagnole : un aspect de la xénophobie en Espagne (1598-1665), soutenue à l'Université Paul Valéry-Montpellier III le 18 mars 1974 (PUSE. Publications de l'Université de Saint-Etienne, 1976), il avait créé, en 1968, le département d'Espagnol de Saint-Etienne. Pendant de nombreuses années, il a été membre du CNU et du Jury de l'Agrégation externe. C'est une figure marquante de l'hispanisme qui disparaît.
Tous ses collègues et étudiants lui doivent énormément. Tous ont pu apprécier en lui ses compétences, sa gentillesse courtoise, sa culture immense, sa curiosité sans limites et ses traits d'humour.
Edgar Samper.
Le 21 février dernier, Jordi Joaquim Costa (1939-2018), professeur de linguistique catalane honoraire à l’Université de Perpignan – Via Domitia, nous a quittés. Avec lui disparaît l’un de ces enfants de réfugiés catalans qui ont pu trouver, de ce côté-ci de la frontière, avec l’École de la République, tout un chemin de réussite professionnelle qui leur a permis de conjuguer racines et métier.
Jordi, chercheur discret mais toujours assidu à la tâche, après une carrière d’enseignant d’espagnol dans le secondaire, a réalisé sa thèse – publiée en 1986 sous l’intitulé Atlas linguistique “Sacaze” des confins catalano-languedociens – sur les traces d’Henri Guiter, à qui il est resté fidèle, malgré les critiques (davantage idéologiques que proprement scientifiques) que son œuvre a pu susciter.
Jordi Costa a su transmettre avec conviction ses deux passions, pour la dialectologie et l’onomastique, à ses étudiants de l’Institut Franco-Catalan Transfrontalier. L’enseignement de la variété et de la richesse de la langue et de son lien consubstantiel à la culture, l’ont amené à présider un temps le jury du CAPES de catalan.
Ses recherches ont fait à juste titre (et l’estime particulière que lui portait, entre autres, le grand dialectologue Joan Veny) de lui un membre correspondant de l’Institut d’Estudis Catalans pour la Catalogne Nord. C’est ainsi qu’il n’a jamais cessé de publier des articles soignés et rigoureux, et de participer à des revues, colloques et congrès sur tout le territoire des Pays catalans, et au-delà, de la romanistique. Comme témoins les plus significatifs de cet engagement dans une recherche de spécialiste exigeant, on retiendra, outre l’Atlas Sacaze, un Répertoire patronymique des Pyrénées-Orientales au XIXe siècle (1994), Onomàstica a la Catalunya Nord (1997) et le Répertoire-atlas diachronique des noms de famille des Pyrénées-Orientales au XXe siècle (2000).
À son épouse, à sa fille Marie-Noëlle, spécialiste du Spill de Jaume Roig et de traduction, qui dirige actuellement le Département d’Études hispaniques de l’UPVD,et à toute sa famille, la SHF dont il a longtemps été membre, exprime ses sincères condoléances.
Christian Lagarde
1928-2017
Julián Garavito, dont le patronyme apparaît dans des documents d’archives depuis plusieurs siècles en Colombie, est né à Bogotá en 1928 de parents colombiens. Venu en France dès l’enfance, il a réalisé, à Paris, ses études primaires, secondaires (lycées Montaigne et Louis-le Grand) et supérieures (Faculté de Droit et Sorbonne), obtenant, outre un premier Baccalauréat de Droit, une Licence en Lettres (1949) et un Certificat d’Aptitude à l’enseignement du français à l’étranger (1951). Il a alors commencé une longue carrière d’enseignant en espagnol, en particulier dans le domaine économique et commercial. En 1952, il est devenu professeur à l’École des Cadres pour jeunes filles (aujourd’hui EDC Paris Business School). Très attaché à la diffusion de la langue espagnole, il est l’auteur de deux ouvrages d’apprentissage, écrits seul ou en collaboration.
Parallèlement à l’enseignement, il a mené une intense activité de traducteur et de critique. À partir de 1964, il a collaboré régulièrement à de nombreuses revues, tant françaises que colombiennes et latino-américaines dont celle de la Société Française des Traducteurs (Traduire), dans laquelle, outre des comptes rendus, il a écrit des articles sur Miguel Angel Asturias et Alejo Carpentier. Il a aussi été la cheville ouvrière du numéro d’Europe (juillet-août) consacré à la littérature colombienne, alors très peu connue ainsi que l’auteur de chronologies historico-littéraires et de plusieurs articles parus dans les numéros-panoramas présentant les littératures du Pérou (juillet-août 1966), du Guatemala (septembre 1968), du Paraguay (juin 1970) ou du Chili (octobre 1976).
Adhérent de la Société des Langues Néo-Latines pendant plus de quarante-cinq ans et secrétaire général pendant une vingtaine d’années, il a alimenté la revue, jusqu’à ses derniers jours, avec ses notes de lecture. Membre de l’Association France-Cuba depuis sa fondation (1961), il a été le rédacteur en chef de Cuba sí. En Colombie, il a participé à la vie intellectuelle de plusieurs revues de la capitale : Espiral, Noticias Culturales, Razón et Fábula et a publié maintes recensions sur des œuvres littéraires et des travaux linguistiques dans le Thesaurus de l’Institut Caro y Cuervo. Il est aussi l’auteur d’un long et riche essai de 224 pages publié et diffusé par le Centre des Hautes Études Afro-Ibéro-Américaines de l’Université de Dakar : Introduction à la culture colombienne (1971).
Les traductions qu’il a assurées sont aussi nombreuses que variées : des romans comme Mamita Yunai de C.L. Fallas (traduit en 1964), Deux jours de septembre de J.M. Caballero Bonald (1966), L’homme qui avait tout, tout, tout de M. A. Asturias (1973) ; des anthologies poétiques comme La Poésie costaricienne du XXe siècle (1997) ou La Poésie panaméenne du XXe siècle (2005) publiées chez Patiño ; des récits comme L’homme qui avait l’air d’un cheval de Rafael Arévalo Martínez (2005) ou comme les Nouvelles hispano-américaines 1 (2003, en collaboration avec C. Régnier) ou encore des études comme Carlos Gardel. Tango à l’infini (2007) ou La cité des colonnes, étude d’Alejo Carpentier sur l’architecture de La Havane (2015) pour n’en citer que quelques-unes.
C’est un homme de grande culture et un infatigable passeur de littérature latino-américaine qui s’en est allé.
Catherine Heymann
Aucun évènement |