Description:
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La présente enquête remet en cause un jugement répandu parmi les historiens des cisterciennes, qui consiste à considérer l’apparition subite des moniales dans les décrets du chapitre général de Cîteaux au début du XIIIe siècle comme un progrès de leur condition. En réalité, les capitulants multipliaient leurs champs d’action depuis la fin du XIIe siècle et construisaient alors le droit cistercien. Les communautés féminines, au statut mal défini, leur posaient donc problème, jusqu’à ce que le Chapitre, en 1213, réclamât le monopole des procédures de fondation ; Rome le lui concéda tardivement, en 1251. Ce changement d’attitude des cisterciens n’était donc nullement motivé par la prise en compte des intérêts spirituels des femmes, et ne constituait pas une réponse à un afflux des vocations, à ce Frauenbewegung dont la réalité est d’ailleurs discutable. Il s’inscrivait dans une période où se définissaient progressivement les contours juridiques de l’Ordre. Au XIIe siècle, aucun aval de Cîteaux n’était nécessaire pour fonder une communauté féminine ; au XIIIe, le Chapitre contrôlait désormais la procédure de fondation, et il imposait en outre aux communautés, par l’intermédiaire des abbés-pères, des règles de vie quotidienne. Simples émules des communautés masculines au XIIe siècle, les abbayes féminines étaient devenues leurs sujettes. |