On s'est beaucoup interrogé sur l'articulation de la double face de Macedonio Fernández (Buenos Aires, 1874-1952), auteur de textes philosophiques et d'une oeuvre littéraire variée (humour, roman, poésie). Cet ouvrage, dont le fil conducteur est la critique de la représentation dans le domaine philosophique et dans la pratique littéraire, cherche à saisir le moment où la distinction entre philosophie et littérature disparaît. Le concept d'affection, élaboré à la lisière des oeuvres de ses maîtres (A. Schopenhauer, W. James) et dans l'effervescence des avant-gardes, est la clé de cette entreprise.
En 1921 arrive en Argentine le fils d'un ami de jeunesse de Macedonio, J. L. Borges, qui rapporte ainsi les liens d'amitié qui se nouèrent entre eux : « Les historiens de la mystique juive parlent d'un type de maître appelé Zaddik, dont la doctrine de la Loi est moins importante que le fait qu'il soit lui-même la Loi. Il y avait quelque chose de Zaddik chez Macedonio. En ces années-là , je l'imitais jusqu'à la simple transcription, jusqu'au plagiat passionné et plein de dévotion. Je ressentais Macedonio comme étant la métaphysique et la littérature. Ceux qui l'ont précédé ont pu resplendir dans l'histoire, mais c'étaient des brouillons de Macedonio, des versions préalables et imparfaites. Ne point imiter cette norme eût été une incroyable négligence. » Les pages de ce livre ne perdent jamais de vue les traces que Macedonio a pu laisser dans l'oeuvre de son disciple le plus doué.