L'investiture de Sebastián Piñera à la Présidence de la République chilienne, le 11 mars 2010, marque le retour de la droite à la tête du pouvoir exécutif, vingt ans après la fin négociée de la dictature militaire du Général Pinochet. Configurée par 40 ans de luttes, parfois mythifiées ou méconnues (l'Unité populaire, la Dictature, la Transition démocratique), cette nouvelle inflexion dans l'histoire politique chilienne pousse à s'interroger sur les réalités, les transformations et les continuités de ce pays tantôt présenté comme « modèle », tantôt comme « laboratoire », du néolibéralisme et de la société de marché en Amérique latine. Qu’elle soit héritée de l'histoire contemporaine ou issue de changements plus récents, une série de problèmes traverse les relations spécifiques entre néolibéralisme, démocratisation, techniques de pouvoir, résistances collectives et société.
L'objectif de ce colloque international est de se pencher, dans une perspective ouverte et transdisciplinaire, sur les dynamiques du Chili actuel, depuis le procès du Général Pinochet en 1998 jusqu’à nos jours. Plutôt que de rester centré sur une approche uniquement en termes de pratiques institutionnelles ou « transitologiques », nous espérons ouvrir des espaces de pensée critique sur les divers champs sociaux du Chili actuel. Comment penser, analyser et définir alors l'ordre « démolibéral » chilien ? Est-on réellement face à un « modèle », à cet homo oeconomicus des théories néo-classiques ou plutôt à une « nouvelle raison du monde » ? Comment lire les inégalités sociales et le modèle développement en cours ? De quelle manière, et selon quelles pratiques, les Chiliens s'inscrivent-ils dans cette réalité sociale et politique, parfois interprétée comme celle du « néolibéralisme triomphant »? De quelle manière décrypter le nouveau cycle protestataire que vit le pays et selon quels répertoires ? Quels usages publics du passé et comment penser la justice transitionnelle des dernières années ? Quelles représentations et modes de dominations dans le cadre d’un système politique modelé par la Constitution autoritaire de 1980 ? Quelles mises en récit et productions culturelles (notamment cinématographiques) de cette société néolibérale ?
Nous proposons de décliner cette problématique générale autour de cinq thématiques ou axes plus spécifiques et autour desquelles nous pensons pouvoir déconstruire, tout du moins partiellement, cette réalité complexe du Chili néolibéral actuel, c'est-à-dire précisément ses structures, formes et dynamiques, mais aussi les rapports entre les individus et les champs sociaux qui la constituent.
Axe 1) Ordre néolibéral, justice transitionnelle et guerres des mémoires
Axe 2) Renouveaux de l'action collective, mouvements sociaux et résistances
Axe 3/ Partis, « gouvernement des meilleurs » et démocratisation aujourd’hui
Axe 4) Un modèle de développement « néolibéral » ? Ressources naturelles, dépendance et inégalités
Axe 5) Création cinématographique et société néolibérale