“Les Faces cachées des Amériques”
Colloque international les 22-23 mars 2018
Université Bretagne Sud, Lorient
Co-organisé par HCTI (UBS), 3L.AM (Le Mans) and MIMMOC (Poitiers), France
Dans sa célèbre nouvelle, La lettre volée, Edgar Allan Poe montre que pour cacher un objet, la meilleure stratégie peut être de le mettre en évidence dans un endroit où l’on ne pense pas à regarder. S’interroger sur les faces cachées des Amériques s’inscrit ainsi à l’opposé d’une approche complotiste ; il s’agit de mettre au centre des recherches des objets soit mal connus soit minorés, soit oubliés, soit inattendus. Ainsi, aux États-Unis, l’écrivain noir Ralph Ellison a publié en 1952 un roman intitulé L’Homme invisible pour aborder l’exclusion des Afro-Américains. Ce roman s’intéressait à une face cachée, mais pourtant bien réelle, en plein cœur d’une société et d’un pays.
Michael Harrington parlait, au début des années 1960, de L’Autre Amérique dans son étude sur les pauvres ; il présentait ainsi à ses compatriotes une face cachée de leur pays. Les marginaux et les exclus sont bien évidemment l’une des faces cachées des Amériques. Travailler sur les inégalités est une façon de faire émerger une face cachée dans l’espace médiatique qui détermine souvent les sujets abordés dans l’espace politique. De la même manière, avec la récente élection de Donald Trump, un néophyte en politique et un iconoclaste, même aux yeux du Parti républicain, à la présidence des États-Unis, le pays a choisi de faire un saut dans l’inconnu pour mettre en lumière des faces obscures, voire obscurantistes, jusque-là cachées, aux conséquences imprévisibles. On peut aussi étudier la face cachée du processus électoral états-unien qui prive des citoyens de leur droit de vote, permet des sources de financement « cachées » ou obscures et autorise un lobbying direct et indirect, qui échappe à toute réglementation fédérale en toute légalité.
De la même façon, on pourra étudier le sort des Indiens en Amazonie ou au Pérou ou encore les processus de privatisation des grandes entreprises publiques ces dernières années, la sous-traitance, les fusions, la flexibilisation du travail et la répression qui font rage en Colombie malgré l’impression donnée que le « pays va mieux ». De la même manière on pourra mettre l’accent sur ce que cachent la coupe du monde de football ou les jeux olympiques au Brésil, dans un pays où la police militaire a chassé les habitants des favelas de Rio pour construire des installations sportives et par ailleurs financer la Fédération Internationale de Football (FIFA) ou le Comité International Olympique (CIO). On pourra aussi s’interroger sur les forces, elles-mêmes corrompues, qui ont conduit à la destitution de la présidente légitimement élue, dans des conditions problématiques dont on peut dire qu’elles s’apparentent à un coup d’état.
L’exposition de photographes chiliens qui eut lieu en avril 2016 à la Maison de l’Amérique latine à Paris, intitulée « Faces cachées : Photographie chilienne, 1980-2015 » présentait ainsi des photographes à la recherche de ce que l’on ne veut pas voir, qui n’est plus ou a disparu. Les images semblent ainsi capter l’interdit, le lointain, l’insaisissable en même temps que la résistance à l’ordre établi et un attachement profond à ces communautés « invisibles » qui peuplent leur pays. Il apparaît que les arts en tant que systèmes symboliques spécifiques qui contribuent à l’accroissement de nos capacités de perception et de connaissance peuvent être une source privilégiée pour mettre au jour les faces cachées des Amériques.
Ainsi, il pourra s’agir de mettre en lumière un système social, politique et/ou religieux qui remet en cause l’idée même de terre promise, de Nouveau Monde, que les Amériques sont censées incarner. Terres d’immigration, de multiculturalisme et de tolérance notamment quand on les compare aux pays de l’Ancien Monde, les nations américaines représentent des exemples de démocratie et d’opportunités, dans la conscience collective. Mais face à la réalité, qu’elle soit historique ou contemporaine, cette idée de Nouveau Monde ne cache t-elle pas une réalité plus sombre ?
C’est dans cette recherche d’une « autre » Amérique que se place ce colloque sur les Faces cachées des Amériques, dans une tentative de lever le voile sur les coins d’ombres de lieux oubliés, camouflés mais bien vivants. Mettre à jour les paradoxes, les éléments inattendus, pour mieux comprendre ce que sont les Amériques. Ce colloque peut donc se concevoir comme la révélation de faces cachées tant en sciences sociales, en histoire qu’en études littéraires, en arts visuels ou en philosophie, en anthropologie ou en linguistique.
Les propositions de communication sont à envoyer à , et avant le 6 septembre 2017. Les réponses seront communiquées pour la fin du mois de septembre 2017.
Les communications pourront se faire en français, en espagnol ou en anglais. Les publications se feront en français et en anglais.
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