Appel à communications - Hemingway et l’Amérique du Sud : la fabrique transculturelle du vivant / Hemingway y Sudamérica: La fabricación transcultural y la experiencia viva de lo cotidiano |
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Colloque 23 et 24 novembre 2023
Laboratoire 3L.AM, Le Mans Université
Hemingway et l’Amérique du Sud : la fabrique transculturelle du vivant
La figure d’Hemingway est à jamais liée à Cuba, et réciproquement. La légende dit même que le fantôme d’Hemingway rôderait encore et toujours à Finca Vigía, la demeure où il vécut, qui est aujourd’hui la propriété de l’île et a été reconvertie en un musée qui abrite des milliers d’ouvrages et autres objets qui sont autant de souvenirs de la présence du Prix Nobel sur l’île.
Cuba a été une source indéniable d’inspiration pour l’auteur, qui y écrit notamment l’œuvre qui lui valut le Pulitzer en 1953: The Old Man and the Sea. L’auteur a confié à un journaliste: « This is one prize that belongs to Cuba, because my work was conceived and created in Cuba, with my people of Cojimar, where I’m a citizen. Throughout all the translations, this, my adopted country is present, and here I have my books and my home ».
C’est là une affirmation de filiation extrêmement puissante. Les liens entre Hemingway, son œuvre et Cuba sont indéniables, concrets, tangibles; on en trouve même de nombreuses manifestations plus ou moins étonnantes, et qui constituent aujourd’hui une ressource touristique capitale pour l’île.
Hemingway a découvert La Havane en 1928 au cours d’un voyage vers la Floride où il allait résider jusqu’en 1940 avec Pauline Pfeiffer, sa deuxième femme qu’il avait épousée 10 mois plus tôt à Paris. Les Hemingway se sont installés à Key West, une toute petite ville insulaire située à l’extrémité occidentale de l’archipel des Keys, et faisant face à Cuba, située à 145 kilomètres de l’autre côté du Golfe du Mexique. Il s’est mis à fréquenter régulièrement la Perle des Antilles durant les années 1930, avant de s’y installer définitivement après son divorce avec Pauline en 1940. Hemingway a acheté une grande propriété (la Finca Vigia) située dans la banlieue de la Havane, où il allait vivre avec sa troisième femme Martha Gellhorn puis Mary Welsh, sa quatrième et dernière épouse. Conformément à la volonté d’Hemingway, Mary a fait don de la propriété au gouvernement cubain, qui l’a transformée en un musée (le musée Ernest Hemingway de Cuba ou Finca Vigia).
La vie d’Hemingway à Cuba a laissé des traces indélébiles que les visiteurs de l’île ne manquent pas d’apprécier. Outre la Finca Vigia le nom et le souvenir d’Hemingway sont associés à la Marina Hemingway, le plus grand port de plaisance de l’île, où l’on organise annuellement un tournoi international de pêche, le « Tournoi Hemingway » (« Torneo Hemingway »). La fontaine de l’hôtel El Viejo y el mar, ainsi nommé après le célèbre récit d’Hemingway, reproduit une scène grandeur nature du combat entre le « vieil homme » et l’espadon.
Les traces d’Hemingway sont visibles dans des bars de la ville, dans les statues édifiées en son honneur. Ainsi, son souvenir imprègne les lieux mais aussi les goûts. Son nom est également associé au goût, par exemple la variante du célèbre daïquiri cher à Hemingway et qui porte depuis le nom affectueux de « Papa Hemingway », les lieux qu’affectionnait l’écrivain tels que le bar Floridita (où l’on trouve une statue grandeur nature de l’auteur), l’hôtel Ambos Mundos, le restaurant Bodeguita del Medio…
Présent dans la mémoire culturelle de l’île, l’écrivain nord-américain l’est également dans sa mémoire politique. Lorsque Fidel Castro a pris le pouvoir en 1959, Hemingway n’a pas évacué l’île comme les autres Américains qui y vivaient et comme l’y invitait avec insistance l’ambassadeur des États-Unis. Bien au contraire, il a soutenu publiquement les objectifs révolutionnaires de Castro, ce qui a fort déplu à Hoover, patron du FBI, et à ses agents.
Cuba a été une source d’inspiration importante pour Hemingway dès les années 1930. L’écriture de trois œuvres importantes et d’autres mineures a été inspirée de sa vie à Cuba et de ses expéditions de pêche dans le Gulf Stream. Il en est ainsi de son roman « prolétaire », En avoir ou pas, mais aussi d’Îles à la dérive, roman publié à titre posthume en 1970, et d’un de ses récits les plus célèbres, Le vieil homme et le mer. Lorsqu’il a obtenu le Prix Nobel en 1954 Hemingway a décidé d’offrir la prestigieuse médaille au peuple cubain et non pas au gouvernement de Batista. C’est pourquoi il a rendu hommage à ce lien indéfectible qui le lie au peuple cubain et à sa culture, en décidant de remettre la médaille à la Virgen de la Caridad del Cobre, patronne de Cuba et des pêcheurs de Cojímar, église qu’évoque le célèbre pêcheur Santiago à un moment difficile de son récit, lorsqu’il promet d’y faire une offrande s’il parvient à ramener le poisson entier à bon port.
Le protagoniste du Vieil homme et le mer est d’origine espagnole, qui vit à Cuba et qui rêve à l’Afrique quand il ne pêche pas. Cette géographie culturelle complexe, conçue par un écrivain étatsunien, rappelons-le, dit un puissant intérêt pour l’altérité culturelle et pour l’hybridation des différences chez Hemingway. Elle n’est pas spécifique à l’appropriation de la culture cubaine par Hemingway, mais relève d’une vision transculturelle des différences, saisissable dans le multilinguisme de son écriture, dans la géographie composite de son œuvre, l’incorporation spontanée de traits culturels de divers pays par ses personnages. Bien que central, cet aspect n’a pas encore été abordée par les commentateurs.
L’ouverture transculturelle autant biographique que littéraire chez Hemingway porte plus loin que le cosmopolitisme des modernistes qu’il a découvert et apprécié dans les années 1920 pendant son séjour comme « expatrié » à Paris. Chez cet écrivain la culture en partage est vivante. Certes, il y a une intertextualité « savante » dans ses œuvres mais elle est canalisée dans et par les conduits de la concrétude, l’expérience quotidienne du vivant...
Pour Hemingway la rencontre culturelle est d’abord expérientielle. Comme il l’écrit : « T’occupe pas des églises, des bâtiments gouvernementaux ou des places au centre des villes. Si tu veux découvrir une culture, passe une nuit dans ses bars ». John Dewey ou Antonin Artaud auraient certainement apprécié cette philosophie culturelle qui comprend la vie comme l’organisation des forces de la vie, « propriété » non pas des États mais des citoyens qui la nourrissent par leurs désirs et par leurs capacités créatives spontanées.
L’intérêt manifeste d’Hemingway pour le monde hispanique en général, sa manière d’ancrer le littéraire dans le vivant – ce qui élargit en soi le socle transculturel de sa vision du monde et les possibilités d’hybridations littéraires –, explique en partie l’attrait qu’il a exercé sur beaucoup d’écrivains sud-américains tel Gabriel Garcia Marquez, lequel considérait Hemingway comme son « maestro ». D’ailleurs certains commentateurs ont pu identifier la présence transtextuelle d’Hemingway dans l’œuvre de l’écrivain colombien. Et si l’on ne peut affirmer que le fantôme de l’auteur hante réellement les lieux, il est bel et bien toujours présent dans le cœur et l’esprit des Cubains. On peut ainsi citer le roman de l’auteur au succès désormais international Leonardo Padura, qui en a fait une figure centrale de son roman Adiós Hemingway (2001). Dans une perspective transculturelle étendue, on peut également citer le roman Cuba Libre (2021), de l’écrivain belge Claude Rappé, dont l’action est basée à Cuba.
Ainsi, ce sont aussi des connexions intangibles qui unissent définitivement Hemingway aux intellectuels hispano-américains. En tant que journaliste tout d’abord, il a laissé une marque suffisamment profonde pour qu’une chaire de journalisme de l’Instituto Internacional de Periodismo José Martí de La Havane porte son nom —tout un symbole: une chaire baptisée du nom d’un États-Unien, au sein d’un institut portant le nom de l’une des figures les plus emblématiques de l’identité révolutionnaire cubaine. C’est ainsi une reconnaissance explicite de l’influence de l’écriture journalistique d’Hemingway, à qui sont régulièrement consacrées des conférences organisées par l’Institut. García Márquez affirma ainsi que « aucun écrivain – en dehors de José Martí, bien sûr –, n’a été l’objet d’autant d’hommages, à autant de niveaux ». On voit bien l’importance de l’auteur dans la culture cubaine, élevé au même rang que l’un des pères fondateurs de la nation.
Nul doute donc qu’Hemingway, dont les œuvres sont par ailleurs largement enseignées aux élèves de l’île, fait partie intégrante de la formation littéraire cubaine. De nombreux articles élogieux consacrés à l’auteur ont ainsi été publiés à Cuba dès les années 1950. (Il faut cependant noter les points de vue plus critiques de certains intellectuels, parmi lesquels quelques commentaires de Tomás Gutiérrez Alea dans son film Memorias del subdesarrollo (1968), ou encore les mots d’Edmundo Desnoes dans le roman du même nom: « Nosotros / los cubanos / salimos muy mal parados en la obra de Hemingway ».)
Cuba est ainsi indéniablement présente dans l’œuvre d’Hemingway à bien des niveaux. Une biographie récente, publiée aux Etats-Unis (Ernesto: The untold story of Hemingway in Revolutionary Cuba, d’Andrew Feldman, 2019) affirme également que l’écriture d’Hemingway fut influencée par le roman Contrabando (1938), du journaliste cubain Enrique Serpa, qu’il aurait connu – et croisé notamment au bar El Floridita.
Il semble donc que si l’on peut aisément arguer qu’Hemingway est une figure incontournable de l’héritage culturel de l’île, tant dans son patrimoine tangible qu’intangible, des transferts culturels plus profonds auraient eu lieu entre les États-Unis et Cuba, par l’intermédiaire de cette figure littéraire emblématique. Quelle est l’étendue de l’influence de l’auteur chez les écrivains latino-américains, et inversement (sachant que l’expérience latino-américaine d’Hemingway s’est largement concentrée sur Cuba, puisqu’il n’a connu qu’un bref séjour au Mexique et au Pérou), dans les domaines de la civilisation, de la littérature et du journalisme. Par ailleurs, on peut également se pencher sur la figure du personnage mexicain dans l’œuvre d’Hemingway (par exemple dans la nouvelle « Le joueur, la nonne et la radio »), la réception de son œuvre dans d’autres pays de l’Amérique du Sud. Cette dimension transtextuelle peut également être examinée à l’aune de la transculturalité conçue comme une fabrique littéraire du vivant. Telles sont les questions centrales que nous pourrions étudier lors de ce colloque américaniste, auxquelles on peut associer les thématiques connexes de l’hybridité culturelle, du transfert culturel, de la traduction et de l’interculturalité.
Bibliographie indicative
Cirules, Enrique, Hemingway en Cuba, Madrid, Ed. Libertarias, 1999.
Clifton, Sandra J. Ernest Hemingway and Gabriel García Márquez: Cultural Ascendancy and the Shaping of Literary Figures, 2011. (Publié à compte d’auteur.)
Cortanze, Gérard, de, Hemingway à Cuba, Paris, Gallimard, 2018.
Feldman, Andrew, Ernesto: The Untold Story of Hemingway in Revolutionary Cuba, Brooklyn, Melville House, 2019.
Fuentes, Norberto, Hemingway à Cuba, Editorial Letras cubanas, 1984, préfacé par Gabriel García Márquez.
Funci, Claudio Izquierdo, Hemingway Poor Old Papa, Ed. MEC-Grafic, Turin, 1995.
Márquez, Gabriel García, « Mon Hemingway à Moi », Revue Feuilleton, n° 21, octobre 2017. http://www.editions-du-sous-sol.com/article/hemingway-a-moi/
McFarland, Ron, Appropriating Hemingway Using him as a Fictional Character, Jefferson, North Carolina, McFarland and C° Inc, 2015.
Rodríguez, Osmar Mariño, Un campeón en La Habana, Ed. Deportes, 2006.
Ross, Ciro Bianchi, Tras los pasos de Hemingway en La Habana, La Havane, Ed. Prensa Latina, 2001.
Schaefer, David, Sailing to Hemingway’s Cuba, Dobbs Ferry, New York, Sheridan House, Inc., 2000.
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Le colloque aura lieu à l’Université du Mans le 23 et 24 novembre 2023 (possibilités de visioconférences), et sera ouvert aux spécialistes américanistes dans le domaine des arts (littérature, cinéma…), de la linguistique, de l’histoire et de la civilisation, des sciences humaines et sociales. Les langues de communication acceptées seront l’anglais, l’espagnol et le français.
Les propositions (comportant un titre, ainsi qu’un résumé d’entre 300 et 500 mots) seront à adresser avant le 30 juin 2023 aux deux adresses suivantes:
Coloquio 23 y 24 de noviembre de 2023
Laboratorio 3L.AM, Le Mans Université
Hemingway y Sudamérica: la fabricación transcultural y la experiencia viva de lo cotidiano
La figura de Hemingway está asociada para siempre a Cuba, y viceversa. La leyenda dice incluso que el fantasma de Hemingway aún acecharía en Finca Vigía, la casa donde vivió, que ahora es propiedad del Estado y se ha convertido en un museo que alberga miles de libros y otros objetos que recuerdan la presencia del Premio Nobel en la isla.
Cuba fue una innegable fuente de inspiración para el autor, que escribió allí la obra por la que recibió el Pulitzer en 1953: El viejo y el mar. El autor le dijo a un periodista: « Este es un premio que pertenece a Cuba, porque mi obra fue concebida y creada en Cuba, con mi pueblo de Cojímar, del que soy ciudadano. En todas las traducciones, éste, mi país de adopción, está presente, y aquí tengo mis libros y mi casa. »
Es ésta una declaración de filiación extremadamente poderosa. Los vínculos entre Hemingway, su obra y Cuba son indiscutibles, concretos, tangibles; incluso hay muchas manifestaciones más o menos sorprendentes de estas conexiones, que hoy constituyen un importante recurso turístico para la isla.
Hemingway descubrió La Habana en 1928 durante un viaje a Florida, donde residiría hasta 1940 con Pauline Pfeiffer, su segunda esposa, con la que se había casado diez meses antes en París. Los Hemingway se instalaron en Cayo Hueso, una diminuta ciudad isleña situada en el extremo occidental del archipiélago de los Cayos, frente a Cuba, a 145 kilómetros del otro lado del Golfo de México. Hemingway comenzó a visitar la Perla de las Antillas con regularidad durante la década de 1930, antes de establecerse allí definitivamente tras su divorcio de Pauline en 1940. Hemingway compró una gran propiedad (la Finca Vigía) en las afueras de La Habana, donde vivió con su tercera esposa Martha Gellhorn y luego con Mary Welsh, su cuarta y última esposa. De acuerdo con los deseos de Hemingway, Mary donó la propiedad al gobierno cubano, que la transformó en un museo (el Museo Ernest Hemingway de Cuba o Finca Vigía).
La vida de Hemingway en Cuba ha dejado huellas imborrables que los visitantes de la isla no dejan de apreciar. Además de la Finca Vigía, el nombre y la memoria de Hemingway están asociados a la Marina Hemingway, el mayor puerto deportivo de la isla, donde cada año se celebra un torneo internacional de pesca, el "Torneo Hemingway". La fuente del Hotel El Viejo y el mar, que lleva el nombre del famoso relato de Hemingway, reproduce una escena en tamaño natural de la lucha entre « el viejo » y el pez espada.
Las huellas de Hemingway pueden observarse en los bares de la ciudad, en las estatuas construidas en su honor. De este modo, su memoria impregna no sólo los lugares sino también los sabores. Su nombre igualmente se asocia al gusto, por ejemplo a la variante del famoso daiquiri muy apreciado por Hemingway y que desde entonces se conoce cariñosamente como « Papa Hemingway ». Los lugares que el escritor amaba como el bar Floridita (donde hay una estatua de tamaño real del autor), el hotel Ambos Mundos, el restaurante Bodeguita del Medio…
El escritor norteamericano no sólo está presente en la memoria cultural de la isla, sino también en su memoria política. Cuando Fidel Castro tomó el poder en 1959, Hemingway no evacuó la isla como los demás estadounidenses que vivían allí y como instaba el embajador de Estados Unidos. Por el contrario, apoyó públicamente los objetivos revolucionarios de Castro, lo que les disgustó mucho al jefe del FBI, Hoover, y a sus agentes.
Cuba fue una importante fuente de inspiración para Hemingway desde la década de 1930. Tres obras mayores y algunas menores están inspiradas en su vida en Cuba y en sus expediciones de pesca en el Gulf Stream. Es el caso de su novela "proletaria", Tener y no tener, pero también de Islas a la deriva, novela póstuma publicada en 1970, y de uno de sus relatos más famosos, El viejo y el mar. Cuando ganó el Premio Nobel en 1954, Hemingway decidió entregar la prestigiosa medalla al pueblo cubano y no al gobierno de Batista. Por ello, rindió homenaje al vínculo inquebrantable que lo une al pueblo cubano y a su cultura, al decidir entregar la medalla a la Virgen de la Caridad del Cobre, patrona de Cuba y de los pescadores de Cojímar, iglesia que menciona el famoso pescador Santiago en un momento difícil de su historia, cuando promete hacerle una ofrenda si consigue llevar el pescado entero a buen puerto.
El protagonista de El viejo y el mar es de origen español, vive en Cuba y sueña con África cuando no está pescando. Esta compleja geografía cultural, concebida por un escritor estadounidense, recordémoslo, demuestra un poderoso interés por la alteridad cultural y la hibridación de las diferencias en Hemingway. No es específica de la apropiación de la cultura cubana por parte de Hemingway, sino que forma parte de una visión transcultural de las diferencias, que se puede captar en el multilingüismo de su escritura, en la geografía heterogénea de su obra, en la incorporación espontánea de rasgos culturales de varios países mediante sus personajes. Por más que sea fundamental, los comentaristas todavía no han planteado este aspecto.
La apertura transcultural de Hemingway, tanto biográfica como literaria, va más allá del cosmopolitismo de los modernistas que descubrió y apreció en los años 20 durante su estancia como "expatriado" en París. En este escritor, la cultura compartida está viva. Si bien hay una intertextualidad "erudita" en sus obras, se canaliza en y por las vías de la concreción, la experiencia viva de lo cotidiano...
Para Hemingway, el encuentro cultural es ante todo vivencial. Como él mismo escribe: "No te preocupes por las iglesias, los edificios gubernamentales o las plazas de las ciudades. Si quieres descubrir una cultura, pasa una noche en sus bares ». John Dewey o Antonin Artaud habrían apreciado sin duda esta filosofía cultural, que entiende la vida como la organización de las fuerzas vitales, "propiedad" no de los Estados, sino de los ciudadanos que la alimentan con sus deseos y capacidades creativas espontáneas.
El evidente interés de Hemingway por el mundo hispánico en general, su forma de anclar lo literario en lo vivo -lo que en sí mismo amplía la base transcultural de su cosmovisión y las posibilidades de hibridación literaria- explica en parte la atracción que ha ejercido en muchos escritores sudamericanos como Gabriel García Márquez, quien consideraba a Hemingway como su "maestro". Además, algunos comentaristas han identificado la presencia transtextual de Hemingway en la obra del escritor colombiano. Y aunque no se puede asegurar que el fantasma del autor ronde realmente por la Finca, sin lugar a dudas sigue presente en el corazón y en la mente de los cubanos. Podemos citar a modo de ejemplo la novela del autor de éxito internacional Leonardo Padura, que lo convirtió en una figura central de su novela Adiós Hemingway (2001). Desde una perspectiva transcultural amplia, otro ejemplo sería la novela Cuba Libre (2021), del escritor belga Claude Rappé, que se desarrolla en Cuba.
Así, son conexiones también intangibles que unen definitivamente a Hemingway con los intelectuales hispanoamericanos. En primer lugar, como periodista, dejó una huella lo suficientemente profunda como para que una cátedra de periodismo del Instituto Internacional de Periodismo José Martí de La Habana lleve su nombre —todo un símbolo: una cátedra designada con el nombre de un ciudadano estadounidense, dentro de un instituto que lleva el nombre de una de las figuras más emblemáticas de la identidad revolucionaria cubana. Constituye un reconocimiento explícito de la influencia de la escritura periodística de Hemingway, a quien el Instituto dedica regularmente conferencias. García Márquez afirmó así que "ningún escritor -a excepción de José Martí, por supuesto- ha sido objeto de tantos homenajes, a tantos niveles". Esto demuestra claramente la importancia del autor en la cultura cubana, elevado al mismo rango que uno de los padres fundadores de la nación.
No cabe duda de que Hemingway, cuyas obras se enseñan ampliamente a los estudiantes de la isla, es parte integrante de la educación literaria cubana. A partir de los años 50 se publicaron en Cuba numerosos artículos elogiosos sobre el autor (aunque cabe destacar las opiniones más críticas de algunos intelectuales, entre las cuales unos comentarios de Tomás Gutiérrez Alea en su película Memorias del subdesarrollo (1968), o las palabras de Edmundo Desnoes en la novela epónima: "Nosotros / los cubanos / salimos muy mal parados en la obra de Hemingway").
Así pues, Cuba está innegablemente presente en la obra de Hemingway a muchos niveles. Una reciente biografía publicada en Estados Unidos (Ernesto: The untold story of Hemingway in Revolutionary Cuba, de Andrew Feldman, 2019) también afirma que la escritura de Hemingway fue influenciada por la novela Contrabando (1938), del periodista cubano Enrique Serpa, a quien se dice que conoció -y con quien se habría cruzado en el bar El Floridita.
Parece, entonces, que si bien es fácil argumentar que Hemingway es una figura ineludible en el legado cultural de la isla, tanto en su patrimonio material como inmaterial, se habrían producido transferencias culturales más profundas entre los Estados Unidos y Cuba a través de esta emblemática figura literaria. ¿Cuál es el alcance de la influencia del autor en los escritores latinoamericanos, y viceversa (teniendo en cuenta que la experiencia latinoamericana de Hemingway se centró en gran medida en Cuba, ya que sólo visitó brevemente México y el Perú), en los ámbitos de la civilización, la literatura y el periodismo? Además, se puede examinar la figura del personaje mexicano en la obra de Hemingway (por ejemplo, en el cuento "El jugador, la monja y la radio"), la recepción de su obra en otros países sudamericanos. Esta dimensión transtextual también puede examinarse a la luz de la transculturalidad concebida como una fabricación literaria de lo vivo. Éstas son las cuestiones centrales que podríamos estudiar durante este coloquio americanista, a las que podemos asociar los temas relacionados de hibridez cultural, transferencia cultural, traducción e interculturalidad.
Bibliografía indicativa
Cirules, Enrique, Hemingway en Cuba, Madrid, Ed. Libertarias, 1999.
Clifton, Sandra J. Ernest Hemingway and Gabriel García Márquez: Cultural Ascendancy and the Shaping of Literary Figures, 2011.
Cortanze, Gérard, de, Hemingway à Cuba, Paris, Gallimard, 2018.
Feldman, Andrew, Ernesto: The Untold Story of Hemingway in Revolutionary Cuba, Brooklyn, Melville House, 2019.
Fuentes, Norberto, Hemingway à Cuba, Editorial Letras cubanas, 1984, prefacio escrito por Gabriel García Márquez.
Funci, Claudio Izquierdo, Hemingway Poor Old Papa, Ed. MEC-Grafic, Turin, 1995.
Márquez, Gabriel García, « Mon Hemingway à Moi », Revue Feuilleton, n° 21, octubre de 2017. http://www.editions-du-sous-sol.com/article/hemingway-a-moi/
McFarland, Ron, Appropriating Hemingway Using him as a Fictional Character, Jefferson, North Carolina, McFarland and C° Inc, 2015.
Rodríguez, Osmar Mariño, Un campeón en La Habana, Ed. Deportes, 2006.
Ross, Ciro Bianchi, Tras los pasos de Hemingway en La Habana, La Havane, Ed. Prensa Latina, 2001.
Schaefer, David, Sailing to Hemingway’s Cuba, Dobbs Ferry, New York, Sheridan House, Inc., 2000.
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Este coloquio se desarrollará en la Universidad de Le Mans el 23 y 24 de noviembre de 2023 (videoconferencias posibles), y estará abierto a los/las especialistas americanistas en artes (literatura, cine…), lingüística, historia, humanidades y ciencias sociales. Las comunicaciones podrán presentarse en español, en francés o en inglés.
Las propuestas de comunicación (un título, así como un resumen de 300-500 palabras) deberán enviarse antes del 30 de junio de 2023 a:
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Lieu Le Mans Université | ||||||
Contact Rédouane Abouddahab () et Lucie Valverde () | ||||||
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