Ce que l’Amérique latine dit à l’Europe : circulations, imaginaires, regards (et fantasmes) |
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Ce que l’Amérique latine dit à l’Europe : circulations, imaginaires, regards (et fantasmes) Colloque transdisciplinaire - 8 et 9 décembre 2022 à CY Cergy Paris Université
Appel à communications - Llamado a ponencias
Argumentaire :
On tend souvent à penser l’Amérique latine comme une périphérie de l’espace mondial. L’idée même de mondialisation est fréquemment assimilée à celle d’ « américanisation » culturelle (Tournès 2020). Entendue comme « états-unisation », celle-ci n’est généralement envisagée que comme une circulation des idées, des modèles, des savoirs, des techniques ou des objets culturels du Nord ou de l’Occident vers les Suds (Compagnon 2009). Pourtant, travailler sur l’Amérique latine nous amène fréquemment à en rencontrer les traces ou à en identifier l’influence en Europe.
En politique, l’intérêt des partis et intellectuel.le.s de gauche s’est depuis longtemps tourné vers les modèles politiques alternatifs émergeant à Cuba avec la révolution de 1959, au Venezuela avec Hugo Chávez, au Brésil des budgets participatifs ou au Chili, de Salvador Allende à Gabriel Boric (Andreani 2013; Catuhe 2017; Porto de Oliveira 2017). Ce cumul d’expériences est fréquemment analysé sous le prisme du « laboratoire » (Couffignal 2013) : l’Amérique latine se présente alors comme une terre d’inspiration pour de nouvelles forces partisanes en Europe (Chazel 2019), pour l’émergence de nouvelles mobilisations féministes (Forteza 2021) ainsi que, de l’autre côté du spectre politique, pour la diffusion d’un modèle économique néolibéral (Gaudichaud 2014) ou d’un anticapitalisme de droite radicale (Cucchetti 2015).
Dans les cultures populaires, la marque de l’Amérique latine s’est faite ressentir dans la mise en forme, la diffusion et la réappropriation de styles musicaux tels que la bossa nova, chantée aussi bien par Maria Creuza que par Michel Fugain (Fléchet 2013). Des mécanismes similaires de circulation/hybridation musicale, ancrés dans des configurations spatiales complexes (intégrant souvent les États-Unis comme plateforme d’échanges) peuvent également être observés pour la salsa ou le reggaeton – musiques « latines » dont la production et la diffusion s’effectuent en grande partie en dehors de l’Amérique latine (Mar-Molinero 2010; Román-Velázquez 1999). On retrouve des dynamiques semblables dans le cinéma populaire fabriqué au Nord, porteur d’un imaginaire de l’Amérique latine parfois caricatural, comme en témoignent les nombreuses critiques adressées par la recherche latino-américaniste à la série à succès Narcos (Pérez Rickart et Pannell 2021; Rivera-Vélez 2020; Tahir 2021). Les effets de ce type de production sur les perceptions de l’Amérique latine ne sont-ils pas un élément routinier mais peu discuté du quotidien des chercheur/ses latino-américanistes dans leurs interactions avec leurs interlocuteurs/trices européen.ne.s ? Ces imaginaires de l’Amérique latine ne se limitent par ailleurs pas aux grosses productions commerciales. Elles sont un élément marquant du cinéma politique européen, de Chris Marker (Le fond de l’air est rouge) (Amaral de Aguiar 2013) à Pierre Carles (Opération Correa) en passant par Costa Gavras (État de siège, Missing), et on les retrouve aussi, par exemple, dans certains thrillers d’Olivier Assayas (Carlos, Cuban Network). N’en va-t-il pas de même avec une certaine littérature francophone latino-américaniste incluant des auteurs/trices aussi divers que Caryl Férey (Condor, Mapuche, Paz), Laura Alcoba (Manèges, La danse de l’araignée, Par la forêt), Santiago Amigorena (Le premier exil) ou Amina Damerdji (Laissez-moi vous rejoindre) – pour ne citer que les plus contemporain.e.s ?
Quant aux sciences et savoirs européens, on peut dire qu’ils sont souvent tributaires de l’Amérique latine. L’anthropologie structurale n’est-elle pas redevable envers les sociétés dites « primitives » observées par Claude Lévi-Strauss au Brésil (Skidmore 2003) ? Et si la « pensée décoloniale », au cœur de nombreuses controverses intellectuelles, est parfois présentée comme un nouvel impérialisme venu des campus nord-américains, on oublie souvent que les études décoloniales ont d’abord émergé en Amérique latine/Abya Yala, avant de se diffuser dans le Nord global (Falquet 2021; Quiroz 2020). En mettant au centre de la réflexion les populations minorisées du sous-continent, ces dernières permettent par ailleurs d’aborder cette dialectique Sud/Nord comme une mécanique complexe, faite d’allers-retours et de dominations croisées. On peut ainsi s’interroger sur ce que les savoirs européens doivent à ces différentes facettes de l’Amérique latine et sur les initiatives, conscientes ou inconscientes, hégémoniques ou contre-hégémoniques, auxquelles cette dette peut (ou non) donner lieu.
Politique, culture ou savoirs : l’objectif de ce colloque est d’étudier quelques-unes de ces diverses formes de présence de l’Amérique latine en Europe et/ou dans le regard européen. Les travaux discutés ici pourront prendre ces circulations pour objet, en en analysant les processus, les formes et l’impact. Mais ils pourront également prendre une forme plus réflexive, en interrogeant la place des chercheurs et chercheuses s’intéressant à l’Amérique latine en Europe, leurs perceptions de ce statut « dominé » dans leur propre champ d’études, et les stratégies ayant été ou pouvant être déployées pour le contourner, voire le renverser. Dans cette perspective, les communications pourront faire état de recherches en cours ou abouties, mais aussi reposer sur des réflexions plus embryonnaires pouvant alimenter la discussion collective, notamment sur le plan méthodologique.
Informations pratiques
Propositions de communication : Les propositions doivent être adressées à David Copello () avant le 15 juillet 2022. Elles contiendront un titre, un court résumé des enjeux abordés (entre 1000 et 1500 signes) et une courte biographie de l’auteur/trice.
Langues du colloque : français, espagnol, anglais, portugais.
Procédure de sélection : Les propositions de communication seront évaluées par le comité scientifique du colloque. Les participant.e.s sélectionné.e.s seront informé.e.s à la mi-septembre. Une réponse sera envoyée à tou.te.s les candidat.e.s.
Date et lieu de l’événement : les 8 et 9 décembre 2022 à CY Cergy Paris Université, Maison Internationale de la Recherche, 1 rue Descartes, 95000 Neuville-sur-Oise.
Les interventions auront lieu intégralement en présentiel, sauf exception. Pour celles et ceux qui n’auraient pas accès à une prise en charge des frais de déplacement et d’hébergement, merci de nous le signaler dans votre mail de présentation.
Lo que América latina le dice a Europa: circulaciones, imaginarios, miradas (y fantasías)
Llamado a ponencias - Coloquio transdisciplinario – 8 y 9 de diciembre 2022, CY Cergy Paris Université
Argumento :
América Latina está generalmente pensada como una periferia del espacio global. El propio concepto de globalización se confunde a menudo con la idea de "americanización" cultural (Tournès 2020) – restringiéndose frecuentemente su sentido a una simple “estadosunidización”. Siguiendo esta dinámica, la circulación de ideas, modelos, conocimientos, técnicas u objetos culturales suele considerarse únicamente como un movimiento orientado desde el Norte o desde el Oeste hacia el Sur (Compagnon 2009). Sin embargo, quien trabaja sobre América Latina en Europa se encuentra repetidamente con sus rastros o su influencia.
En política, desde hace varias décadas, los partidos e intelectuales de la izquierda europea le han prestado gran atención a los modelos políticos alternativos surgidos en Cuba con la revolución de 1959, en Venezuela con Hugo Chávez, en Brasil con los presupuestos participativos o en Chile, con la influencia de Salvador Allende y, más recientemente, la de Gabriel Boric (Andreani 2013; Catuhe 2017; Porto de Oliveira 2017). Esta acumulación de experiencias se analiza frecuentemente bajo el prisma del "laboratorio" (Couffignal 2013): América Latina se presenta entonces como una tierra de inspiración para nuevas fuerzas partidistas en Europa (Chazel 2019), para nuevas movilizaciones feministas (Forteza 2021) y también, del otro lado del espectro político, como un punto de difusión para un modelo económico neoliberal (Gaudichaud 2014) o un anticapitalismo de extrema derecha (Cucchetti 2015).
En el ámbito de las culturas populares, América latina ha marcado con su impronta el diseño, la difusión y la reapropiación de estilos musicales como la bossa nova, cantada por María Creuza pero también por Michel Fugain (Fléchet 2013). Mecanismos de circulación/hibridación parecidos pueden ser observados en cuanto a la salsa o el reggaeton, músicas “latinas” cuya producción y difusión se efectúa en gran parte fuera de América latina, y pone de relieve configuraciones espaciales complejas dentro de las cuales Estados Unidos actúa muchas veces como plataforma de intercambios (Mar-Molinero 2010; Román-Velázquez 1999). Se pueden observar dinámicas parecidas en cierto cine popular producido en países del Norte, anclado en un imaginario algo caricaturesco de América latina, como bien lo muestra la recepción crítica de una serie como Narcos entre los especialistas del subcontinente (Pérez Rickart et Pannell 2021; Rivera-Vélez 2020; Tahir 2021). En cierta medida, los efectos de la recepción de este tipo de productos culturales pueden considerarse un elemento rutinario, aunque poco mencionado, en la vida cotidiana de las y los investigadorxs latinoamericanistas confrontadxs con sus pares europeos. Por otro lado, la difusión de estos imaginarios latinoamericanistas no se limitan al cine comercial. También son un elemento fundamental dentro del cine político europeo representado por directores tan diversos como Chris Marker (Le fond de l’air est rouge) (Amaral de Aguiar 2013), Pierre Carles (Opération Correa) o Costa Gavras (Estado de sitio, Missing), así como en ciertos thrillers dirigidos por Olivier Assayas (Carlos, Cuban network). También podrían identificarse procesos similares o comparables dentro de la literatura latinoamericanista escrita en francés, con autores y autoras contemporánexs como Caryl Férey (Condor, Mapuche, Paz), Laura Alcoba (Manèges, La danse de l’araignée, Par la forêt), Santiago Amigorena (Le premier exil) o Amina Damerdji (Laissez-moi vous rejoindre).
En cuanto a las ciencias y conocimientos europeos, puede decirse que a menudo dependen de América Latina. ¿Acaso la antropología estructural no tiene una deuda con las llamadas sociedades "primitivas" observadas por Claude Lévi-Strauss en Brasil (Skidmore 2003)? Y si uno se fija en los estudios decoloniales, objeto de importantes controversias intelectuales y repetidamente presentados como un nuevo imperialismo o como una emanación de los campus norteamericanos, se suele obviar que surgieron primero en América Latina/Abya Yala, antes de extenderse al Norte global (Falquet 2021; Quiroz 2020). Al situar a las poblaciones minorizadas del subcontinente en el centro de la reflexión, estos estudios también nos permiten abordar la dialéctica Sur/Norte como un mecanismo complejo, compuesto por movimientos de ida y vuelta y dominaciones cruzadas. Se puede entonces cuestionar lo que el conocimiento europeo debe a estas diferentes facetas de América Latina y discutir las iniciativas, conscientes o inconscientes, hegemónicas o contrahegemónicas, a las que esta deuda puede (o no) dar lugar.
Política, cultura o saberes: el objetivo de esta conferencia es estudiar algunas de estas diversas formas de presencia latinoamericana en Europa y/o en la mirada europea. Los trabajos presentados podrán tomar estas circulaciones como objeto, analizando sus procesos, formas e impacto. Pero también podrán adoptar una forma más reflexiva, y cuestionar el lugar que ocupan los y las investigadorxs interesadxs en América Latina pero basadxs en Europa, sus percepciones de este estatus "dominado" en su propio campo de estudio, y las estrategias que se han desplegado o podrían desplegarse para eludirlo o incluso revertirlo. En esta perspectiva, las ponencias podrán dar cuenta de investigaciones en curso o finalizadas, pero también basarse en reflexiones más embrionarias que puedan alimentar el debate colectivo, especialmente en el plano metodológico.
Informaciones prácticas
Propuestas de ponencias: Las propuestas deberán ser enviadas a David Copello () antes del 15 de julio de 2022. Constarán de un título, un breve resumen de los temas tratados (entre 1000 y 1500 caracteres) y una breve biografía del autor o de la autora.
Idiomas de la conferencia: francés, español, inglés y portugués.
Proceso de selección: Las propuestas serán evaluadas por el comité científico de la conferencia. Lxs participantes seleccionadxs serán informadxs a mediados de septiembre. Se enviará una respuesta a todxs lxs solicitantes.
Fecha y lugar del evento: 8 y 9 de diciembre de 2022 en CY Cergy Paris Université, Maison Internationale de la Recherche, 1 rue Descartes, 95000 Neuville-sur-Oise.
El coloquio se desarrollará de forma presencial. Quienes no tengan acceso a una financiación para los gastos de viaje y alojamiento podrán señalarlo en su correo electrónico de presentación.
Comité scientifique/comité científico:
- Julie Amiot, CY Cergy Paris Université – Héritages : Culture/s, Patrimoine/s, Création/s
- Maya Collombon, Sciences Po Lyon - Triangle
- Hélène Combes, CNRS/Sciences Po Paris – CERI
- Humberto Cucchetti, Universidad Nacional de San Martín (Argentine) – CEDIPE
- Jules Falquet, Université Paris 8 Vincennes Saint-Denis – LLCP
- Anaïs Fléchet, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines – CHCSC
- Franck Gaudichaud, Université Toulouse Jean Jaurès – FRAMESPA
- Camille Goirand, Institut des Hautes Études de l’Amérique Latine – CREDA
- Carlos Miguel Herrera, CY Cergy Paris Université – CPJP
- Alfredo Joignant, Universidad Diego Portales (Santiago de Chile) – COES
- Frédéric Louault, Université Libre de Bruxelles - CEVIPOL
- Eugénia Palieraki, CY Cergy Paris Université - CPJP
- Kevin Parthenay, Université de Tours – IRJI François Rabelais
- Lissell Quiroz, CY Cergy Paris Université – AGORA
Références bibliographiques/referencias bibliográficas:
Amaral de Aguiar, Carolina. 2013. « Chris Marker et l’Amérique latine : cinéma militant et circulation des idées politiques ». Cinémas d’Amérique latine, no 21: 4‑16.
Andreani, Fabrice. 2013. « Du nomadisme idéologique à l’allégeance partisane : les mondes franco-vénézuéliens de la réélection de Hugo Chávez (2012) ». Critique internationale, no 2: 119‑32.
Catuhe, Alexis. 2017. Ernesto « Che » Guevara : la fabrique française d’un mythe. Paris: Le Félin.
Chazel, Laura. 2019. « De l’Amérique Latine à Madrid : Podemos et la construction d’un « populisme de gauche » ». Pôle Sud 50 (1): 121‑38.
Compagnon, Olivier. 2009. « L’Euro-Amérique en question : Comment penser les échanges culturels entre l’Europe et l’Amérique latine ». Nuevo Mundo Mundos Nuevos. https://doi.org/10.4000/nuevomundo.54783.
Couffignal, Georges. 2013. La nouvelle Amérique latine : laboratoire politique de l’Occident. Paris: Presses de Sciences Po.
Cucchetti, Humberto. 2015. « Droites radicales et péronisme: un mélange de traditions anticapitalistes? » In Références et thèmes des droites radicales au XXème siècle (Europe-Amériques), édité par Olivier Dard, 169‑89. Berne: Peter Lang.
Falquet, Jules. 2021. « Généalogies du féminisme décolonial : en femmage à María Lugones ». Multitudes 84 (3): 68‑77.
Fléchet, Anaïs. 2013. «Si tu vas à Rio...»: La musique populaire brésilienne en France au XXe siècle. Paris: Armand Colin.
Forteza, Paula. 2021. « La quatrième vague féministe en Amérique latine : de la rue aux institutions ». Paris: Fondation Jean Jaurès.
Gaudichaud, Franck. 2014. « La voie chilienne au néolibéralisme. Regards croisés sur un pays laboratoire ». Nuevo Mundo Mundos Nuevos. https://doi.org/10.4000/nuevomundo.67029.
Mar-Molinero, Clare. 2010. « The spread of global Spanish: From Cervantes to reggaetón ». In The handbook of language and globalization, édité par Nicolas Coupland, 162‑81. Blackwell.
Pérez Rickart, Carlos, et Jack Pannell. 2021. « The Guadalajara Cartel Never Existed ». Noria Research. http://noria-research.com/the-guadalajara-cartel-never-existed/.
Porto de Oliveira, Osmany. 2017. International policy diffusion and participatory budgeting: Ambassadors of participation, international institutions and transnational networks. New York: Palgrave Macmillan.
Quiroz, Lissell. 2020. « Investigar y enseñar historia en perspectiva feminista decolonial ». Márgenes, Revista de Educación de la Universidad de Málaga 1 (2): 138‑52.
Rivera-Vélez, Luis. 2020. « Narcos et l’histoire dé-colombianisée de la Colombie ». TV/Series, no 17. https://doi.org/10.4000/tvseries.4253.
Román-Velázquez, Patria. 1999. The Making of Latin London: Salsa music, place and identity. London: Routledge.
Skidmore, Thomas E. 2003. « Lévi-Strauss, Braudel and Brazil: A case of mutual influence ». Bulletin of Latin American Research 22 (3): 340‑49.
Tahir, Nadia. 2021. « Narcos, une histoire d’archives ». Ecrans, no 15: 233‑48.
Tournès, Ludovic. 2020. Américanisation : une histoire mondiale (XVIIIe-XXIe siècle). Paris: Fayard.
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Lieu CY Cergy Paris Université, Maison Internationale de la Recherche, 95000, Neuville-sur-Oise | ||||||
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