Colloque international « Le tango, de Carlos Gardel a Astor Piazzolla : cent années mythiques de créations » |
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Appel à communications Colloque international organisé par l’équipe d'accueil Textes & Cultures (EA 4028) de l'Université d’Artois (18-19 mai 2017) Si le tango –musique et danse– est un phenomene aujourd’hui planetaire, puisqu’il est joue et danse non seulement en Argentine et en Uruguay, mais aussi en Allemagne, en Finlande, en France, en Italie ou au Japon, rares sont, en revanche, les reflexions sur l’histoire du tango. C’est pourquoi nous profitons du centenaire de l’enregistrement par Carlos Gardel de Mi noche triste, qui a signifie l’acte de naissance du tango comme chanson, pour inviter a une reflexion sur la construction historique du tango, ses enjeux symboliques, sociaux et politiques, de 1917 aux annees 1980, annees qui marqueront une indeniable inflexion du tango avec Astor Piazzolla. Le tango est ne dans le Rio de La Plata, region de pampa ou le Parana se jette dans l'Atlantique, baignant une partie de l’Argentin e et de l’Uruguay. Si, aujourd’hui, le tango appartient indiscutablement aux villes de Buenos Aires et de Montevideo (mais aussi de Medellin en Colombie, et pour certains a la ville de Paris), il constitue une vaste nebuleuse dans laquelle l’on trouve des pratiques de musique et de danse traditionnelles d’origine noire (candombe, tango, milonga...), peu a peu « blanchies » par l’arrivee massive dans les annees 1880 d’emigrants europeens entrainant la transformation sociale des secteurs urbains du Rio de La Plata. Ricardo Rodriguez Molas remarque en 1957 dans La musica y la danza de los negros en el Buenos Aires de los siglos XVIII y XIX q u e le mot tango –o u tambo– est commun a plusieurs langues des regions d’Afrique noire d’ou furent preleves les esclaves. Le mot signifie alors « lieu ferme », « cercle », « enclos » et, par extension, definit tout espace interdit auquel on ne peut acceder qu’apres avoir rempli certaines conditions initiatiques ; les negriers appelaient ainsi les endroits ou ils parquaient les esclaves. A ces origines mythiques africaines, le tango integre aussi une origine andalouse : le tanguillo qui serait une ancienne danse de la Renaissance ayant emigre a Cuba au moment de la conquete. Pour ajouter encore a la complexite, on jouait dans les theatres du Rio de la Plata, a la fin du XIXeme siecle, des melodies qui, sous le nom de tango, etaient en fait de simples habaneras. La musique de tango, aujourd’hui musique d’auteurs individualises, semble avoir puise dans le fonds musical traditionnel et anonyme de cette zone, en profonde resonance avec les musiques des autres regions de l’Amerique latine. L’on considerera alors le tango comme facteur d’identite, et l’on s’interrogera, par exemple, sur ces metissages musicaux qui ne furent pas l’œuvre du corps social dans son ensemble, mais l’expression de groupes sociaux qui utiliserent alors le tango comme determinant culturel permettant une identification au travers d’une distanciation. La constitution d’un groupe social semble donc s’etre faite par ce ciment identitaire commun a des etrangers en mal de reperes culturels, pour qui le tango œuvre a un syncretisme, vecteur d’enjeux sociaux, politiques et identitaires. La construction historique du tango est egalement tributaire d’une mythification constante dont on a fait preuve a son egard des lors qu’il devint un enjeu symbolique entre les groupes sociaux qui en revendiquaient la propriete, notamment apres la mort prematuree de Carlos Gardel en 1935. Carlitos est la legende meme : date et lieu de naissance discutes, mort tragique et plus ou moins mysterieuse en Colombie. Enfant de la rue ne pauvre du cote de Toulouse et devenu richissime, celibataire, il incarne les aspirations populaires. Dote d’une voix reconnaissable entre toutes, ses influences sont a mi-chemin de la chanson faubourienne et de l’Opera lyrique. Grace au parolier Alfredo Le Pera, qui debarrasse le texte du langage lunfardo, le tango fera alors le tour du monde, et son age d’or correspondra aux annees 1946 a 1955 de la presidence de Juan Domingo Peron qui le consacrera art officiel. Ce sera egalement l’epoque ou des poetes vont commencer a ecrire les paroles de tango c o m m e, entre autres, Enrique Santos Discepolo et Homero Manzi. La poesie contribuera alors a la description de la realite sociale et a la construction des personnages mythiques du tango : le guapo vetu de noir comme la mort qu’il cotoie, avec sa pochette blanche a ses initiales et son foulard en alpaga, car en cas de malheur il eut ete deshonorant de mourir sur le trottoir dans une autre tenue ; le compadre qui se refugie dans la nostalgie du passe, affecte ses mouvements, surtout lorsqu’il s’agit de faire tomber la cendre de sa cigarette avec l’ongletreslong du petit doigt; lecompadrito, autre habitue de la litterature populaire argentine, meprisable vantard qui d’un simple coup de cravache parvient a faire taire ; enfin, le compadron, lache macho qui abuse des femmes et des faibles, triche au jeu, trompe ses amis avant de s’enfuir au premier heurt. En plus d’un siecle de vie, le tango a laisse en partie derriere lui ses origines, sans les renier pour autant. Il a cree de nombreux styles differents, s’est perennise, a rejoint la musique savante la plus avant-gardiste –grace notamment au compositeur engage Gustavo Beytelmann et son programmatique Front de la culture– et la danse contemporaine, connait des festivals et des milliers d’adeptes qui, dans le monde entier, participent aux bals de tango. Bien plus qu’un genre musical et choregraphique, il est devenu un univers a lui tout seul, integrant litterature, poesie, peinture, philosophie, musique et danse. Nebuleuse complexe, capable de digerer d’autres univers esthetiques ou de s’integrer a eux, le tango aura marque un espace et un temps d’uneempreinte indelebile, a l’instar des autres musiques d’origine africaine- americaine, telles que le jazz et les musiques bresiliennes ou cubaines dont le tango est l’une des ramifications. Entre la fin du XIXeme siecle ou il acquiert une structure formelle definie et aujourd’hui, l’histoire du tango aura ete aussi mouvementee que l’histoire du Cone Sud lui- meme dont il est le fidele reflet. Ne du metissage de la ville, veritable langage musical, le tango, par nature, se transforme et absorbe. Au cours du siecle precedent il n’aura eu de cesse, en effet, a intervalles reguliers, d’enrichir son corpus melodique, sa structure rythmique et harmonique, sa poesie, sa choregraphie, et de subir toutes les influences musicales et choregraphiques, mais aussi sociales et politiques. En definitive, nos debats autour du tango –musique et danse– pourront se constituer autour des axes suivants :
Les langues du colloque seront l’espagnol et le français. Une publication des actes de ce colloque est prevue. Responsable de l’organisation du colloque : Dominique CASIMIRO, associe aux equipes « CoTraLis » et « Praxis / Esthetique des arts » (Textes & Cultures) Comité scientifique : Annick Louis (MCF HDR – Université de Champagne Ardennes) Carmen Pineira-Tresmontant (PU – Université d'Artois) Dates et lieu de rencontre : les 18 et 19 mai 2017 à la Maison de la Recherche de l'Université d'Artois BIBLIOGRAPHIE INDICATIVE Monographies critiques BARRELLA Humberto, El tango despues de Gardel (1935-1959), Buenos Aires, Corregidor, 1999, 541 p. BERNAND Carmen, Genese des musiques d’Amerique latine. Passion, subversion et deraison, Paris, Fayard, 2013. BORGES Jorges Luis et CLEMENTE Jose Edmundo, El Lenguaje de Buenos Aires [1960], Buenos Aires, EMECE, 1960, 112 p. BOURDE Guy, Urbanisation et immigration en Amerique latine, Paris, Aubier Montaigne, 1974, 288 p. CANTON Edgardo, Le tango, une pure invention : essai sur la poesie du tango-chanson, Paris, Oxus, 2007, 170 p. CASTRO Donald, The Argentine Tango as social history, 1880-1955: the soul of the people, San Francisco, Mellen research university press, 1990, 273 p. DORIER-APPRILL Elisabeth (dir.), Danses ‘latines’ et identites, d’une rive a l’autre : tango, cumbia, fado, samba, rumba, capoeira, Paris, L’Harmattan, 2000, 222 p. ETCHEGARAY Natalio Pedro, MARTINEZ Roberto Luis et MOLINARI Alejandro, De Garay a Gardel: la sociedad, el hombre comun y el tango (1580-1917), Buenos Aires, Biblioteca nacional, 1998, 121 p. FIGUEROA Silvana K., DREHER Jochen et SOEFFNER Hans-Georg (dir.), Construcciones de identidad y simbolismo colectivo en Argentina, Buenos Aires, Prometeo Libros, 2011, 256 p. FLEOUTER Claude, Le tango de Buenos Aires, Paris, J.-C. Lattes, 1979, 129 p. FLORES Rafael, Carlos Gardel: la voz del tango, Madrid, Alianza Editorial, 2003, 230 p. HESS Remi, Le tango, Paris, PUF, coll. « Que sais-je ? », 1996, 127 p. HONORIN Emmanuelle, Astor Piazzolla: le tango de la demesure, preface de Richard GALLIANO, Paris, Demi-Lune, 2011, 208 p. JOYAL France (dir.), Tango, corps a corps culturel : danser en tandem pour mieux vivre, Québec, Presses de l’Universite du Quebec, 2009, 247 p. LARA (de) Tomas et RONCETTI DE PANTI , El tema del tango en la literatura argentina, Buenos Aires, Ediciones Culturales argentinas, 1981, 534 p. LEGIDO Juan Carlos, La orilla oriental del tango: historia del tango uruguayo, Montevideo, Ediciones de La Plaza, 1994, 160 p. ORGAMBIDE Pedro, Gardel y la patria del mito, Buenos Aires, Legasa, 1985, 219 p. PAU PEDRON Antonio, Musica y poesia del tango, prologue d’Ernesto SABATO, Madrid, Editorial Trotta S. A., 2001, 332 p. PENAS Alberto, Recopilacion antologica para una sociologia tanguera, Buenos aires, Ed.Corregidor, 1998, 238 p. PETERSEN Diego, Tango et litterature: la chanson de Buenos Aires. 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Revista de estudios literarios, Universidad Complutense de Madrid, n° 36, 2010, URL : [http://www.ucm.es/info/especulo/numero36/liritang.html]. PRIOUL Françoise, « Culture de l’oubli et memoire culturelle. Une lecture de Cuentos con tango de Pedro Orgambide », Mémoire et culture en Amerique latine, tome II, Mémoire et formes culturelles, Cahiers du CRICCAL, America, n° 31, tome 2, 2002, pp. 145-152. Ouvrages littéraires ELOY MARTINEZ Tomas, El cantor de tango, Barcelona, Planeta, 2004, 251 p. OSORIO Elsa, Cielo de tango, Madrid, Siruela, 2006, 408 p. Usuels MARTINI REAL Juan Carlos (dir.), La Historia del tango, vol. 1 a 9, Buenos Aires, Corregidor, 1977. |
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Lieu Maison de la Recherche de l'Université d'Artois (Arras) | ||||||
Contact Dominique CASIMIRO, MCF Université d'Artois () | ||||||
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