Dans ses avant-propos à l’ouvrage Langue & culture : mariage de raison ? (2009), Rosalind Greenstein rappelait, par une double question rhétorique : « pour qu’une langue soit comprise, ne faut-il pas qu’existe une culture sous-jacente et que cette dernière – ou son histoire – soit partagée parce que connue ? Si elle ne l’est pas, ne risque-t-on pas de voir apparaître une langue artificielle, coupée de ses racines, sans âme, comme le globish, par exemple, ou les différents sabirs qui sortent de Bruxelles ? À moins qu’il ne s’agisse de la construction de nouvelles cultures, auquel cas se pose la question des procédés mis en jeu et des approches qui permettent de les mettre en évidence1 ». L’interdépendance entre langue et culture est valable au sein de toute communauté, que celle-ci soit géographique, nationale, politique, économique, artistique, spirituelle ou professionnelle. Cette culture est composée de savoirs, de valeurs et de pratiques partagés dont la connaissance est essentielle à tout acte de communication véritable et à la construction de tout projet interculturel.
Alors que les langues-cultures de spécialité propres à certains secteurs comme le droit ou l’économie ont suscité de nombreux travaux de recherche, celles qui concernent les domaines des ALL-SHS tels que les arts, les lettres, les sciences historiques, la géographie, la sociologie, la psychologie ou les sciences de l’éducation ont été peu voire pas du tout étudiées. Les anglicistes qui en 2017 et 2018 lançaient les premières journées d’études sur l’anglais de la psychologie, de la philosophie, de la sociologie et de l’histoire affirmaient ainsi : « À notre connaissance, il n’existe toujours pas aujourd’hui de travaux de recherche permettant de commencer à décrire ou définir précisément les contours et la nature de l’anglais utilisé par les psychologues, les sociologues, ou les historiens dans la culture anglo-saxonne2 ». Les propositions en matière de formation reflètent cet état de la recherche : même s’il existe quelques formations innovantes, la majorité des enseignements de langue-culture proposés aux étudiant.e.s inscrit.e.s dans les filières ALL-SHS sont des enseignements à contenu culturel généraliste3. Pourtant, nombreux sont les avantages d’enseignements de langues-cultures de spécialité en matière d’apprentissage, de débouchés mais aussi dans la perspective d’une internationalisation et d’une professionnalisation des formations4. Si le constat est alarmant pour l’anglais, qu’en est-il pour d’autres langues comme l’espagnol, dans un contexte de multiplication des partenariats entre la France et les pays hispanophones, notamment dans la Région Occitanie frontalière avec l’Espagne ?
Forts de deux années d’expérience durant lesquelles ont été éprouvés, à l’Université Toulouse-Jean Jaurès, au sein des enseignements de préparation aux niveaux B1 et B2 d’espagnol, cinq parcours relevant de plusieurs spécialités ALL-SHS, nous souhaitons proposer une première journée d’études sur ce que nous pourrions appeler l’« espagnol pour les humanités », axée sur trois grands domaines : les arts et les lettres ; l’histoire ; la sociologie. L’objectif de cette journée est d’ouvrir une réflexion sur l’espagnol comme langue-culture de spécialité de/pour ces champs de connaissance et de formation, dans une ambition épistémologique et pédagogique, depuis une perspective plurielle qui articule préoccupations sociolinguistiques, dynamiques pluridisciplinaires et pratiques professionnelles.
Croisant réflexion théorique, connaissance et retours de terrain, cette journée s’adressera à tout.e enseignant.e-chercheur.e, enseignant.e, formateur.e ou étudiant.e, intéressé.e par les langues-cultures de spécialité des domaines ALL-SHS sur lesquels portera cet événement, que les langues constituent un objet d’enseignement ou de recherche, ou qu’elles soient au coeur d’un projet de formation (Lansad, licences bilingues, formations professionnalisantes, etc.) ; mais également à tout.e professionnel.le des domaines des arts, de la culture, de la communication, de l’édition, du journalisme, du patrimoine ou de la sociologie impliqué.e dans des projets interculturels ou transnationaux.
Les échanges depuis ces différents points de vue et expériences pourront permettre de mieux cerner ce que peut être l’espagnol pour les arts et les lettres, l’espagnol pour l’histoire et l’espagnol pour la sociologie, aussi bien comme réalités linguistiques et culturelles, que comme sujets de recherche et objets d’enseignement. Deux modalités d’intervention seront proposées : la communication scientifique traditionnelle et le format de l’atelier, moins formel et plus ouvert à la discussion et aux échanges avec le public. En parallèle, une table ronde permettra d’ouvrir un dialogue inter-langues et interdisciplinaire, notamment avec les anglicistes, sur les enseignements de langue-culture pour les domaines des arts et lettres, de l’histoire et de la sociologie, et sur les axes de recherche prioritaires en la matière.
Les propositions de communication (20mn de présentation + 10mn de questions) ou d’intervention dans l’atelier (30mn) pourront porter sur les aspects suivants :
● L’espagnol comme langue-culture pour les arts, les lettres, l’histoire ou la sociologie : quelles réalités linguistiques et culturelles ? quelles communautés professionnelles ?
● Maîtriser l’espagnol et connaître la culture de pays hispanophones pour les métiers des arts, des lettres, en lien avec l’histoire ou la sociologie : quels avantages d’un point de vue professionnel ?
● Les enseignements de langues-cultures pour les étudiants d’arts, de lettres, d’histoire ou de sociologie : quels liens avec la formation disciplinaire ? Pour quels débouchés professionnels ? Pour quels projets de mobilité universitaire ?
● L’espagnol comme langue-culture de spécialité pour les étudiants d’arts, de lettres, d’histoire ou de sociologie : exemples de formations / de pratiques pédagogiques.
● Quelle articulation possible entre le CECRL (Cadre Européen Commun de Références pour les Langues) et la langue-culture de spécialité dans le cas de l’espagnol pour les étudiants d’arts, de lettres, d’histoire ou de sociologie ?
● L’espagnol comme langue-culture de spécialité et la professionnalisation des formations en arts, lettres, histoire ou sociologie.
● L’espagnol comme langue-culture de spécialité et l’internationalisation des formations en arts, lettres, histoire ou sociologie.
● Quelles formations pour les (futur.e.s) enseignant.e.s d’espagnol comme langue-culture de spécialité à destination d’étudiants d’arts, de lettres, d’histoire ou de sociologie ?
● Quelles ressources pédagogiques pour les enseignements d’espagnol comme langue-culture de spécialité pour les arts, les lettres, l’histoire ou la sociologie : des ressources existantes (éditeurs) ? des réseaux d’enseignants ? comment favoriser le travail collaboratif ?
Calendrier :
Envoi des propositions de communication ou d’atelier (300 mots) et d’une courte notice bio-bibliographique au plus tard le 31 mars 2020 à :
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Réponse du comité scientifique : début avril 2020.
Frais d’inscription :
Aucun frais d’inscription ne sera demandé pour participer à la journée.
Comité d’organisation et comité scientifique :
- Émilie Lumière (Université Toulouse-Jean Jaurès, DEHHA, membre du laboratoire LLA-Créatis)
- Alina Castellanos (Université Toulouse-Jean Jaurès, DEHHA, membre associée d’HICOES)
- María Patricio Mulero (Université Toulouse-Jean Jaurès, DEHHA, membre associée des laboratoires Labtop-CRESPPA / LCEIE / CECPCI)
- Gabrielle Massol (Université Toulouse 1 Capitole, Département des Langues et Civilisations)
- Nina Jambrina (Université Toulouse-Jean Jaurès, membre associée du laboratoire LLA-Créatis)
Journée d’études du laboratoire LLA-Créatis, Université Toulouse-Jean Jaurès (UT2J).
Partenaires : Département des Études hispaniques et hispano-américaines, UT2J ; UFR de Langues, Littératures et Civilisations Etrangères, UT2J ; Département des Langues et Civilisations, Université Toulouse Capitole.
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