Au nom du Roi, de la République et du Capital
Légitimation(s) de l’occupation des territoires autochtones
de l’époque moderne à nos jours
Colloque International
Université Paul Valéry – Montpellier 3 (Site St-Charles)
Jeudi 28 et vendredi 29 mars 2019
Appel à communication
Que ce soit aux Amériques, en Asie, en Océanie, en Afrique ou au Moyen-Orient, les grandes puissances européennes ont toujours justifié leur politique coloniale par les bienfaits moraux et matériels qu’elles apportaient aux populations originaires des territoires qu’elles occupaient et exploitaient au seul bénéfice de la métropole. À l’aube des temps modernes, l’Espagne et le Portugal, encore imprégnés du prosélytisme religieux hérité de la Reconquête, légitimèrent leur souveraineté aux Indes occidentales par le fait d’apporter la foi et la salvation à des populations indigènes et « barbares » qu’ils exploitaient par ailleurs à des fins mercantiles. À partir du XIXe siècle, le discours colonialiste européen s’inspira davantage des théories raciales d’Arthur Gobineau ou Herbert Spencer et mit en avant la « mission civilisatrice » des peuples « supérieurs » auprès des peuples « inférieurs » pour justifier les droits que les premiers s’arrogeaient sur ce qu’ils considéraient comme des terrae nullius, des « territoires sans maître » dont on pouvait librement s’approprier. Ainsi, de l’époque moderne aux années 1930, l’apport de la culture occidentale et de la « modernité » suffirent à légitimer politiquement un acte juridiquement illégitime, à savoir la spoliation de terres appartenant à des nations étrangères jugées « inférieures » et donc inaptes à exercer leurs droits.
L’émancipation du joug colonial ne signifia pas nécessairement la fin de l’usurpation des territoires indigènes. Les jeunes républiques américaines, par exemple, entamèrent tout au long du XIXe siècle un processus d’occupation et d’exploitation des territoires nationaux qui étaient restés en marge de la société coloniale. La conquête de l’Ouest étatsunien, du Nord mexicain ou du « désert » patagonien, afin d’y développer l’élevage et l’extraction minière, se traduisit par la prise de possession par la force des territoires « de frontière » peuplés de communautés amérindiennes vivant en marge du système colonial ou républicain. Dans le bassin amazonien, l’essor du caoutchouc incita les autorités péruvienne, bolivienne ou brésilienne à « coloniser » les terres ancestrales des communautés des Andes orientales et des peuples tribaux des basses terres amazoniennes. Tout comme dans le discours colonialiste européen, l’occupation des territoires indigènes et l’expulsion – quand ce n’est l’extermination – des populations autochtones furent justifiées par le « devoir » de la République d’assurer le développement et la prospérité de l’ensemble de la nation tout en apportant la « civilisation » et la « modernité » à des populations que l’on considérait archaïques et réticentes à toute forme de progrès.
En 1989, l’Organisation Internationale du Travail (O.I.T.) adoptait de la Convention n° 169, qui reconnait aux « peuples indigènes et tribaux » une série de droits communautaires visant à satisfaire « l’aspiration des peuples en question à avoir le contrôle de leurs institutions, de leurs modes de vie et de leur développement économique propres et à conserver et développer leur identité, leur langue et leur religion dans le cadre des États où ils vivent ». Vingt-deux pays dans le monde ont depuis ratifié cette convention, dont quatorze en Amérique latine, où la plupart des constitutions reconnaissent aux communautés indigènes un certain nombre de droits, parmi lesquels celui de pouvoir vivre sur leurs terres ancestrales, de disposer d’un espace suffisamment grand pour assurer leur subsistance et de jouir d’un droit de regard sur l’exploitation économique par des entreprises privées ou publiques de leur territoire. En septembre 2007, la Déclaration des Nations Unies sur les Droits des Peuples Autochtones reconnut à son tour le droit des peuples autochtones à posséder, gérer et développer leurs terres et territoires traditionnels. Si cette déclaration fut adoptée à une très large majorité, l’Australie, le Canada, les États-Unis et la Nouvelle-Zélande, où les « peuples indigènes et tribaux » représentent un pourcentage significatif de la population, la rejetèrent dans un premier temps, avant de l’adopter finalement quelques années plus tard. Toutefois, si les droits des « peuples indigènes et tribaux » continuent de progresser dans la plupart des régions du monde, un simple suivi de l’actualité suffit pour constater combien ces droits sont quotidiennement bafoués par l’appât du gain d’orpailleurs ou braconniers solitaires, de PME régionales, de grandes multinationales ou de consortiums internationaux soutenus par un discours officiel qui justifie l’évacuation, l’occupation et l’exploitation de territoires protégés par la législation nationale et internationale en invoquant l’« intérêt général », la croissance et les lois du marché, sans tenir compte des effets dévastateurs de cette « colonisation économique », non seulement sur les populations autochtones mais aussi sur l’écosystème et l’environnement.
Pluridisciplinaire et transversal, ce colloque aura pour objectif d’étudier sous un angle comparatiste et/ou sur le long terme la façon dont les différents pouvoirs – politique, économique et médiatique – ont justifié l’occupation et l’exploitation des territoires indigènes à travers le monde depuis l’époque moderne jusqu’à nos jours. Les communications s’intéresseront donc aux arguments et aux dispositifs juridiques, politiques, économiques, culturels, scientifiques ou encore médiatiques élaborés par les régimes passés et présents afin de légitimer leur politique de colonisation externe ou interne, en dépit des retombées humaines et environnementales. Dans une perspective postcoloniale, on pourra également se pencher sur la manière dont ces dispositifs ont été ou peuvent être déconstruits, en étudiant notamment les mouvements de revendication des peuples autochtones contemporains ou l’actualité récente des aires géographiques concernées.
Les propositions de communication seront envoyées avant le 10 octobre 2018 à l’adresse suivante : . Elles devront comporter le titre de la communication, les mots-clés et un résumé de 200 mots maximum, et seront accompagnées d’une brève présentation de l’auteur d’une dizaine de lignes. Les réponses seront communiquées au plus tard le 30 novembre 2018.
Les langues de communication seront de préférence le Français, mais aussi l’Espagnol, le Portugais et l’Anglais.
Les contributions retenues feront l’objet, après évaluation, d’une publication en Français.
Organisation : Paola DOMINGO – Université Paul Valéry-Montpellier 3 – IRIEC (EA 740)
En el nombre del Rey, de la República y del Capital
Legitimar la ocupación de territorios originarios
desde la edad moderna hasta la actualidad
Coloquio Internacional
Universidad Paul Valéry – Montpellier 3 (Centro Saint-Charles)
Jueves 28 y viernes 29 de marzo de 2019
Convocatoria
Ya fuera en América, Asia, Oceanía, África o Medio-Oriente, las grandes potencias europeas siempre justificaron su política colonial con los progresos morales y materiales que proporcionaban a los pueblos nativos de los territorios que conquistaban y explotaban en beneficio exclusivo de la metrópoli. En la Edad Moderna, España y Portugal, aun impregnadas del proselitismo religioso heredado de la Reconquista, legitimaron su soberanía en las Indias Occidentales por el hecho de llevar la fe y la redención a las poblaciones indígenas y “bárbaras” que explotaban por otra parte con fines mercantiles. A partir del siglo XIX, el discurso colonialista europeo empezó a inspirarse en las teorías raciales de Arthur Gobineau o Herbert Spencer y puso de realce la “misión civilizadora” de los pueblos “superiores” hacia los pueblos “inferiores” para justificar los derechos que los primeros se otorgaban sobre lo que consideraban como terrae nullius, como “territorios sin dueño” de los que podían libremente apropiarse. Fue así como, desde finales del siglo XV hasta los años 1930, la cultura europea y la “modernidad” llevadas a las colonias legitimaban por sí solas un acto jurídicamente ilegitimo como el despojo de tierras pertenecientes a naciones extranjeras consideradas como “inferiores” y por tanto inaptas a ejercer sus derechos.
La emancipación del yugo colonial no necesariamente significó el fin de la usurpación de territorios indígenas. Las jóvenes repúblicas americanas, por ejemplo, se lanzaron a lo largo del siglo XIX en un proceso de ocupación y de explotación de territorios nacionales que se habían quedado al margen de la sociedad colonial. La conquista del Oeste estadounidense, del Norte mexicano o del “desierto” patagónico, con el objetivo de desarrollar la actividad ganadera y minera, se tradujo por la toma de posesión de territorios “de frontera” poblados de comunidades amerindias no integradas por el sistema colonial o republicano. En la cuenca amazónica, el auge del caucho incitó las autoridades peruanas, bolivianas, colombianas, ecuatorianas o brasileñas a “colonizar” las tierras comunitarias de las poblaciones andinas y los territorios ancestrales de los pueblos tribales de la selva tropical. Al igual que en los discursos colonialistas europeos, la ocupación de los territorios indígenas y la expulsión –cuando no la exterminación– de las poblaciones nativas se justificaron por el “deber” de la República de “civilizar y “modernizar” a unas poblaciones consideradas como arcaicas y reacias a toda forma de progreso, así como de garantizar prosperidad y desarrollo a la nación en su conjunto.
En 1989, la Organización Internacional del Trabajo (O.I.T.) adoptó el Convenio núm. 169, que reconoce a los “pueblos indígenas y tribales” una serie de derechos comunitarios destinados a satisfacer “las aspiraciones de esos pueblos a asumir el control de sus propias instituciones y formas de vida y de su desarrollo económico y a mantener y fortalecer sus identidades, lenguas y religiones, dentro del marco de los Estados en que viven”. Veintidós naciones han ratificado dicho convenio, entre ellas catorce naciones de Latinoamérica, donde la mayor parte de las constituciones nacionales reconocen a las poblaciones nativas una serie de derechos particulares, como el de vivir en sus tierras ancestrales, de disponer de un espacio suficiente para garantizar su subsistencia y de gozar de un derecho de consulta sobre la explotación económica de sus tierras por empresas públicas o privadas. En septiembre de 2007, la Declaración de las Naciones Unidas sobre los Derechos de los Pueblos Indígenas reforzó el reconocimiento internacional de los derechos de los pueblos nativos a poseer, administrar y desarrollar sus tierras y territorios tradicionales. A pesar de haber sido aprobada por una amplia mayoría, Australia, Canadá, Estados-Unidos y Nueva-Zelanda, en que los “pueblos indígenas y tribales” representan un porcentaje significativo de la población, empezaron por rechazarla, antes de aprobarlo algunos años más tarde. Sin embargo, y aunque los derechos de los pueblos nativos sigan mejorando a nivel mundial, basta con leer la prensa internacional para darse cuenta de la continua violación de dichos derechos, debida al ánimo de lucro de cazadores y leñadores clandestinos, de agricultores y empresarios locales o de multinacionales y consorcios extranjeros apoyados por discursos oficiales que invocan el interés “general”, el crecimiento y la ley del mercado para legitimar la evacuación, la ocupación y la explotación de territorios protegidos por la legislación nacional e internacional, sin tener en cuenta los efectos destructores de esta “colonización económica”, no sólo sobre las poblaciones nativas, sino también sobre el ecosistema y el medioambiente.
Transversal y pluridisciplinario, este coloquio tendrá por objeto analizar de forma comparatista y/o a largo plazo de la manera en que los diferentes poderes –político, económico o mediático– han ido justificando la ocupación y la explotación de territorios indígenas en el mundo desde la Edad Moderna hasta la actualidad. Las ponencias prestarán por tanto un interés particular a los argumentos y dispositivos jurídicos, políticos, económicos, culturales, científicos o propagandísticos elaborados por los regímenes pasados y presentes para legitimar su política de colonización externa o interna, a pesar de sus consecuencias humanas o medioambientales. En una perspectiva postcolonial, también podrán abordar la manera en que dichos argumentos y dispositivos fueron o pueden ser deconstruidos, estudiando por ejemplo las movilizaciones y reivindicaciones actuales de los pueblos originarios, así como la actualidad reciente de las áreas geográficas interesadas.
Las propuestas serán enviadas antes del 10 de octubre de 2018 a la dirección siguiente: . Deberán integrar el título de la ponencia, un resumen de unas 200 palabras y una breve presentación de su autor de unas diez líneas. Las respuestas se comunicarán a más tardar para el 30 de noviembre de 2018.
Las ponencias se harán preferentemente en francés, siendo también posible hacerlas en inglés, español o portugués.
Las contribuciones escritas serán publicadas exclusivamente en francés, tras evaluación científica de cada contribución.
Organización: Paola DOMINGO
Universidad Paul Valéry-Montpellier 3 – IRIEC (EA 740)
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