Épuisements, réinventions, expérimentations des formes romanesques entre Europe et Amérique, au tournant des XVIIe et XVIIIe siècles
COLLOQUE INTERNATIONAL
Jeudi 26 et vendredi 27 octobre 2023
Université de Lille
Claire BOUVIER (CY Cergy Paris Université, UMR Héritages)
André CARUSO (Universidade Federal do Rio de Janeiro, PEHL)
Michèle GUILLEMONT-ESTELA (Université de Lille, CECILLE)
Amandine LEMBRE (Université de Lille, ALITHILA)
Alain TOURNEUR (Université de Lille, CECILLE)
L’Espagne du Siècle d’or est un laboratoire d’expérimentation et de création du roman moderne. De la picaresque aux satires dévotes et moralisatrices, la fiction en prose narrative est l’objet de diverses évolutions formelles et thématiques. La production de Cervantès et celle de Quevedo, notamment, participent de cette effervescence. Soucieux de plaire à un lectorat consommateur, les écrivains, dont l’activité est en voie de professionnalisation, proposent des productions variées, en hybridant diverses formes d’expression littéraires. L’épuisement de la créativité romanesque en Espagne dès le milieu du XVIIe siècle coïncide avec le renouvellement du genre en France. Les histoires comiques, les romans héroïques, galants et moraux, les romans mémoires, les récits de voyages, les nouvelles historiques sont exportés en Europe et en Amérique. En témoigne, par exemple, la diffusion des multiples traductions des Aventures de Télémaque de Fénelon. Au début du XVIIIe siècle, des auteurs anglais tels que Defoe et Swift, inspirés par l’exotisme de la littérature espagnole, contribuent à réinventer le roman. Ce phénomène de déplacement de la créativité romanesque à travers diverses aires culturelles et linguistiques s’avère fructueux.
Aussi, cette rencontre se propose-t-elle de revisiter la thèse d’une première grande crise espagnole et d’une rénovation européenne du roman, entre la deuxième moitié du XVIIe et le XVIIIe siècle, dans les différents espaces européens et américains.
Axe 1 : L’évolution des propositions formelles et thématiques
Quelles fictions narratives en prose proposèrent les écrivains depuis la seconde moitié du XVIIe siècle jusqu’au milieu du siècle suivant ? À quelles expérimentations formelles s’essayèrent-ils ? À quel horizon d’attente tentèrent-ils de répondre dans leurs écrits ? À quelles traditions se conformèrent-ils ou résistèrent-ils ? Quelle place firent-ils à l’ingegno ? Comment évoluèrent les thématiques, du dialogue allégorique ‒ El Criticón de Gracián (1651-1657), El Rey Gallo y discursos de la Hormiga de Santos (1672) ‒, au roman épistolaire ‒ Les Lettres persanes de Montesquieu (1721), Les Liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos (1782), Cartas Marruecas de Cadalso (1789) ‒, en passant par des récits hétéroclites ‒ Les Aventures de Télémaque de Fénelon (1699), Robinson Crusoé de Defoe (1719), Les Voyages de Gulliver de Swift (1726) ? Dans quelle mesure la morale omniprésente influença-t-elle l’écriture romanesque au cours de cette période ?
Axe 2 : La circulation des textes en Europe et en Amérique
À une époque de faible créativité de la fiction narrative en prose, les rééditions permirent de prolonger l’offre romanesque sur le marché du livre. Quels réseaux de circulation empruntèrent les romans en Europe et en Amérique ‒ institutions religieuses, associations de libraires, réseaux savants, académies, diplomates, collectionneurs, simples particuliers, contrebande ? Quelle fut la part des traductions (telles la picaresque et les nouvelles espagnoles en France, les éditions bilingues et polyglottes dans l’aire ibérique) ? Quels rôles jouèrent les contrefaçons dans la diffusion de ces écrits ? Dans quelle mesure les manuscrits contribuèrent-ils à transmettre ces objets culturels ?
Axe 3 : Le roman face à la concurrence littéraire
Au tournant des XVIIe et XVIIIe siècles, la prose narrative connut diverses modalités de réécriture : des abréviations, des versifications ‒ La Vie de Lazarille de Tormes, ses fortunes et ses adversitez du Sieur de B*** (Paris, 1653), l’Algouasil burlesque, imité des Visions de Dom Francisco de Quevedo du Sieur de Bourneuf (Paris, 1657), le Fata Telemachi (Berlin, 1743), des parodies ‒ Maximas de vertude e formosura de Teresa Margarida da Silva e Orta (Lisbonne, 1752) ‒, des adaptations ‒ Le Roman comique et Les Nouvelles tragi-comiques de Scarron (Paris, 1651-1655), Le Diable boiteux de Lesage (Paris, 1707-1726), Il Telemaco de Scarlatti (Rome, 1718). Quels rapports le roman entretint-il avec les autres genres lettrés tels que le théâtre, la poésie, les traités ‒ dévotion, politique, histoire, géographie, sciences ‒, ou encore les essais de la Pre Ilustración ‒ Teatro clásico universal de Feijoo (Madrid, 1726), écrits de Diego de Torres Villaroel. À l’instar de la controverse entre La Télémacomanie de Faydit (Eleutérople, 1700) et la Critique du livre intitulé La Télécomanie de Rigord (Amsterdam, 1706), comment fut reçu le genre romanesque et quels débats suscita-t-il ?
Les propositions (titre et résumé de 300 mots en français, espagnol, portugais ou anglais) devront être envisagées pour une communication de vingt minutes et seront à soumettre au comité organisateur au plus tard le 1er mars 2023 par mail au format PDF à .
Les interventions proposées lors de ce congrès feront l’objet d’une publication.
Composition du comité scientifique :
Frank Greiner, Guyonne Leduc, Michèle Guillemont-Estela (Université de Lille)
Christine Marguet (Université Paris 8 – Vincennes - Saint-Denis)
David González Ramírez (Universidad de Jaén)
Samuel Fasquel (Université d’Orléans)
Juan Diego Vila (Universidad de Buenos Aires)
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