Depuis la bulle Terrae Nullius, fulminée par le Pape Urbain II en 1095, le monde occidental a cherché à légitimer la prise de possession et l’exploitation de territoires occupés par des populations autochtones considérées comme inférieures et barbares et donc dépourvues de droits ou inaptes à les exercer. Si au « devoir d’évangélisation » des puissances coloniales de l’époque moderne s’est substituée la « mission civilisatrice » que les nations européennes se sont assignée lors du Second Impérialisme aux XIX^e et XX^e siècles, le « développement » et la « croissance » semblent justifier aujourd’hui l’accaparement par le grand capital de territoires indigènes pourtant protégés par des législations nationales et internationales.

À l’occasion de l’année des langues autochtones proclamée par l’Assemblée générale des Nations Unies, ce colloque a pour objectif d’étudier sous un angle comparatiste et sur le long terme la façon dont les différents pouvoirs – politique, économique et médiatique – ont justifié l’occupation et l’exploitation des territoires indigènes à travers le monde depuis l’époque moderne jusqu’à nos jours. Résolument pluridisciplinaires et transversaux, les différents ateliers analyseront les arguments et les dispositifs juridiques, politiques, économiques, culturels, scientifiques ou encore médiatiques élaborés par les régimes passés et présents afin de légitimer leur politique de colonisation externe ou interne, en dépit des retombées humaines et environnementales. Dans une perspective décoloniale, ils s’intéresseront également à la manière dont ces dispositifs ont été ou peuvent être déconstruits, en étudiant notamment les mouvements de revendication des peuples indigènes contemporains et l’actualité récente des aires géographiques concernées.